À la suite de notre chronique littéraire, retrouvez dès à présent nos notes de lecture de l’ouvrage « Clemenceau », par Michel Winock, ainsi que quelques extraits marquants.
Sur la Garde nationale : « La ville [de Paris] était défendue par des soldats de l’armée de ligne, par la garde mobile regroupant les hommes de vingt-cinq à trente-cinq ans célibataires ou veufs sans enfants, mais la pugnacité de la résistance était surtout le fait de la garde nationale. Cette milice bourgeoise, créée pour service de police de proximité, était devenue une véritable armée populaire. »
— Michel Winock, page 16
Sur les liens entre Gambetta et Clemenceau sous la Défense nationale : « Gambetta, qui s’est démarqué de ses collègues de Paris, mais n’a rien pu faire, est à Bordeaux. C’est de là qu’il propose le 3 février [1871] à Clemenceau, dont la réputation de fermeté républicaine et patriotique est parvenue à ses oreilles, de devenir préfet du Rhône, en remplacement de Challemel-Lecour, malade. »
— Michel Winock, page 21
Sur le jacobinisme de Clemenceau : [Clemenceau] « n’était pas, selon une expression de l’époque, un « citoyen de la Rouge », mais républicain jacobin et patriote, il se sentait le devoir de défendre ses convictions au sein d’une Assemblée nationale qui risquait d’être dominée par les royalistes. »
— Michel Winock, page 22
Sur l’héritage de Blanqui vis-à-vis de Clemenceau : « On peut s’étonner de cette amitié et de cette admiration [entre Clemenceau et Blanqui], car Blanqui illustre l’échec permanent de la politique insurrectionnelle opposée à la république démocratique du suffrage universel. Mais l’éloge de 1896, d’une date où Clemenceau n’est plus un carabin assoiffé d’absolu, témoigne d’une certaine date sinon politique, au moins morale. »
— Michel Winock, page 40
Sur le style oratoire de Clemenceau : « L’élocution, (…) sans être abondante et facile, est gouvernée par une volonté qui ne livre rien au hasard ; la phrase est courte, nerveuse, et va rapidement au but. [Il y a] peu ou point de digressions ; dans cette escrime alerte, l’orateur procède par coups droits. »
— Page 63, article du Temps du 5 mars 1879
« Si vous voulez connaître l’homme [Clemenceau], entendez-le à la tribune. [Il n’y a] nul ornement, sinon, de temps à autre, un trait mordant, un mot frappé à l’emporte-pièce, nul souci d’arrondir la période, ni de faire chanter la phrase. C’est de la dialectique toute crue. Cette discussion semée, concentrée, rapide, n’a pas besoin d’apprêt, et dédaigne toute parure. La parole de Clemenceau est nue, trempée, aiguisée comme un fleuret : ses discours ressemblent à de l’escrime, ils criblent l’adversaire de coups droits. »
— Page 109, texte de Camille Pelletan de 1883
Sur l’amnistie des communards : « La question [de l’amnistie des communards] n’est pas une question de simple miséricorde, une question de commutation ou de grâce, c’est-à-dire une question exécutive : c’est une question de haute justice, d’effacement total du passé, c’est-à-dire une question législative. »
— Page 68, article de Victor Hugo dans Le Rappel du 25 mars 1876
« Il ne faut pas attendre la veille des élections [de 1881] pour se décider ; il faut, à l’approche du premier 14-Juillet de la Troisième République, que vous fermiez le livre de ces dix années, que vous mettiez la pierre tumulaire de l’oubli sur les crimes et sur les vestiges de la Commune… »
— Page 76, intervention de Léon Gambetta à la Chambre des députés, le 19 juin 1880
Sur le collectivisme : « Quant à me prononcer pour votre appropriation collective du sol, du sous-sol, etc., je réponds catégoriquement : « Non ! Non ! » Je suis pour la liberté intégrale, et je ne consentirai jamais à entrer dans les couvents et les casernes que vous entendez nous préparer. Le citoyen qui me questionne a dit qu’il n’y avait pas que des jésuites noirs. Il a raison : il y a aussi des jésuites rouges. »
— Page 84, discours de Georges Clemenceau au cirque Fernando (actuel cirque Medrano), à Paris 18e, le 11 avril 1880
« Vous ne vous en cachez pas, que cette socialisation des capitaux ne pourra se faire que par le recours à la force. En quoi, je vous le demande, il est aisé dans le cabinet ou dans une réunion publique de décider en vertu d’un certain raisonnement, que pour appliquer une certaine réforme qui contraint le salut, il faudra recourir à la force, mais (…) êtes-vous prêts à accepter l’effroyable responsabilité que vous encourrez, si pour guérir les maux que vous signalez, vous livriez la société à de pires malheurs ? »
— Page 94, discours de Georges Clemenceau, en août 1881
Sur la colonisation : « Est-ce que, absorbés par la contemplation de cette blessure qui saignera toujours, [les gouvernements français] laisseront tout faire autour d’eux ? Est-ce qu’ils laisseront aller les choses ? Est-ce qu’ils laisseront d’autres que nous faire la police à l’embouchure du Fleuve rouge, et exécuter les clauses du traité de 1874 que nous nous sommes engagés à faire respecter dans l’intérêt des nations européennes ? Est-ce qu’ils laisseront d’autres se disputer les régions de l’Afrique équatoriale ? Laisseront-ils aussi par d’autres les affaires égyptiennes qui, par tant de côtés, sont des affaires vraiment françaises ? »
— Page 135, intervention de Jules Ferry à la Chambre des députés, en juin 1885
Sur le gouvernement direct prôné par Boulanger : « Dans une démocratie, les institutions doivent se rapprocher autant que possible du gouvernement direct. Il est juste et bon que l’on interroge le peuple par voie directe chaque fois que s’élèveront de graves conflits d’opinions, qu’il peut seul résoudre. »
— Page 166, intervention de Georges Boulanger à la Chambre des députés, le 4 juin 1888
Sur la Révolution française comme un bloc : « Que nous le voulions ou non, que cela nous plaise ou que cela nous chagrine, la Révolution française est un bloc. (…) Quelles que soient vicissitudes, péripéties, injustices, qui ont émaillé la décennie révolutionnaire, il faut considérer son héritage comme un tout. »
— Page 179, intervention de Georges Clemenceau à la Chambre des députés, le 29 janvier 1891
Sur le changement d’électorat des radicaux : « Les socialistes élus [en 1893] ont pris la place des radicaux. C’est particulièrement net à Paris, dans les circonscriptions des 19e et 20e arrondissements. (…) En commençant à perdre sa clientèle ouvrière, le radicalisme devient plus représentatif des campagnes, villages, bourgs et sous-préfectures, comme on le constate dans le Sud-Ouest. »
— Michel Winock, page 205