NOTE — La découverte du Brésil, par Cabral


À la suite de notre émission Date-clef, retrouvez dès à présent notre note historique sur la découverte du Brésil, par Cabral. Cet événement, fruit du hasard, intervient quelques années après le partage symbolique du monde entre Portugais et Castillans, acté par le traité international de Tordesillas.


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► Un préalable : le traité de Tordesillas, et sa démarcation

Le 7 juin 1494, le pape, Clément VII, établit un traité international, le traité de Tordesillas, visant à partager le Nouveau monde, dont l’existence est établie de source sûre un an et demi plus tôt par le Génois Christophe Colomb. Considéré comme terra nullius (terre nulle), le Nouveau monde est alors disputé par deux puissances européennes aux visées coloniales : les royaumes du Portugal et de Castille.

Par ce traité, une ligne de partage est établie. Celle-ci se base sur un méridien localisé trois cent soixante-dix lieues (soit environ mille huit cents kilomètres) à l’Ouest des îles du Cap Vert. De ce fait, ce traité place toute terre potentiellement à l’Est sous souveraineté portugaise, attribuant le reste à la Castille. Le Brésil, localisé moins de six ans plus tard, devient donc portugais.

Exclues de fait de ce traité, les autres grandes puissances européennes — royaumes d’Angleterre et de France — n’ont alors comme seule manière d’acquérir les richesses du Nouveau monde que de recourir à la piraterie. Irrité, le roi de France, François Ier, fait savoir que « le soleil luit pour [lui] comme pour les autres », et, pressé par les marins de Normandie et de Bretagne, fait assouplir le traité par le pape, Clément VII.

► Cabral et sa flotte

Quelques années après que soit découverte la voie maritime vers les Indes, le roi Manuel Ier du Portugal (1469-1521) prépare une nouvelle flotte. Celle-ci est toujours destinée vers les Indes, mais est plus importante que par le passé : treize navires au total. La liste desdits navires n’est pas claire. Elle comprendrait les caraques Espirito Santo (Esprit-saint), Santa cruz (Sainte-croix), Fror de la mar (Fleur de la mer), São Pedro (Saint-Pierre), Vitória et Espera (Victoire et Espérance), et un galion, Trindade (Trinité), voire éventuellement Anunciada (Annonciation), El-Rei (Le Roi) et Berrio. L’ensemble doit alors faire un millier d’hommes d’équipage. Des vivres sont prévues pour une expédition d’un an et demi.

C’est un noble qui commande la flotte, depuis El-Rei : Pedro Álvares Cabral, fils du maire de Belmonte, Fernão Cabral. Il est secondé, depuis São Pedro et l’Annunciada, par deux adjoints : Pero de Atayade, et Nuno Leitão. L’équipage compte également un astronome, João Emenelaus. Vasco de Gama semble avoir servi de conseil pour cette expédition, notamment concernant la coordination entre les différents bateaux.

La flotte part du Restelo, à Lisbonne, le 9 mars 1500, à destination de l’Océan indien : Calicut, Cananor, en Inde, et Sofala, au Mozambique. Après avoir franchi les Canaries (22 mars), elle se dirige vers le Cap-Vert. Un mois plus tard, Cabral et ses hommes aperçoivent une terre à l’horizon. La mission décrit alors « une terre avec grande arborisation, un mont ». Il s’agit d’une colline, que Cabral baptiste Monte Pascoal (le Mont pasqual), nommant par ailleurs la terre, Terra da Vera cruz (Terre de la Vraie croix), dans l’actuel État de Bahia.

L’escadre accoste dans une baie, qu’elle nomme Cabrália. Elle y reste jusqu’au 2 mai, avant de reprendre la route. Entre ces deux dates, Cabral reçoit des natifs à bord de son bateau, et perçoit que ceux-ci savant identifier l’argent et l’or. Ainsi, les Portugais comprennent que ces métaux existent dans la région.

Cette rencontre entre les indigènes et l’équipage est documentée par le secrétaire de bord, Pero Vaz de Caminha. Celui-ci explique également que les indigènes ne reconnaissent pas les animaux amenés sur la bateau (excepté un perroquet) et qu’ils rejettent les offrandes faites par les Portugais, aussi bien de vin que de nourriture.

Le 26 avril, le père de Coimbra célèbre une messe, à laquelle assistent les indigènes. Une croix est plantée sur le sol. Le 1er mai, une nouvelle érection de la croix — peut-être haute de sept mètres — solennise la revendication de la terre découverte par le royaume du Portugal. Au lendemain, alors que la flotte part pour les Indes, un des navires, commandé par Gaspar de Lemos, repart en direction du Portugal, pour informer de la nouvelle, la lettre de Caminha portant preuve de la découverte des indigènes, et de leurs réactions.

Voguant sur la côte Est de l’Amérique du Sud, Cabral repart avec la conviction d’avoir découvert non une île, mais un continent tout entier, ce qui est vrai. Le 5, l’escadre se dirige vers l’Afrique. Deux semaines plus tard, alors qu’elle franchit une zone de haute pression dans l’Atlantique Sud, elle perd quatre bateaux. Mais l’essentiel de la flotte gagne tout de même Calicut, en Inde.

► Trois nations indigènes

Les indigènes découverts au Brésil appartiennent à l’une des deux nations qui occupent alors l’actuel Brésil : les Tupiniquin. Ceux-ci sont en rivalité avec un autre peuple, les Tupinamba, tout deux partageant un même système linguistique, le tupi.

Les Tupiniquin que découvrent les Portugais en 1500, peuplent une zone s’étendant de Camamu jusqu’à la limite de l’actuel État d’Espirito Santo, au centre du Brésil, sur le littoral. Quant aux Tupinamba, ils occupent une bande comprise entre Camamu et l’embouchure du Rio São Francisco. Une troisième nation, les Aymoré, occupent un territoire long et étroit, en parallèle de celui des Tupiniquin. Ce peuplement indigène est récent — le milieu du XIVe siècle — et provient du Haut-Xingu, en Amazonie, plus à l’intérieur des terres (dans le Mato Grosso).

► Les indigènes après le départ de Cabral

Quant aux indigènes, ils s’allient partiellement aux Portugais, après le retour de ceux-ci, qui entreprennent de coloniser ces nouvelles terres. Les Tupiniquin s’associent aux Portugais dans la région de Santos et Bertioga. Ici, en 1554, se fonde la ville de São Paulo par un père jésuite : Manuel da Nóbrega.

Catéchisés par les jésuites à Aldeia Nova, les Tupiniquin souffrent de parasites exogènes (comme la variole) et endogènes (comme les fourmis, qui détruisent les récoltes). Cette histoire est connue via Serafim Leite, lequel la consigne dans son História da Companhia de Jesus no Brasil.

► Les cinq cents ans du Brésil : gêne et commémoration

En 2000, la commémoration des cinq ans du Brésil suscite d’amples débats. Celle-ci suppose en effet que l’histoire du Brésil commence non avec le peuplement indigène, mais par la conquête portugaise. Cette démarche eurocentrée est assez critiquée. Un deuxième aspect des critiques autour de l’ « anniversaire du Brésil » est que l’année 1500 incarne aussi le début des souffrances pour les indigènes, bientôt, pour une partie, exterminés, et d’autre part, esclavagisés, sans parler du choc bactériologique avec les Portugais et, dans une certaine mesure, un processus d’assimilation avec l’envahisseur.

Il y a également débat sur la date réelle de découverte du Brésil. En effet, d’autres Portugais ont peut-être investi ce territoire en mission secrète pour clarifier ce qui se situait au-delà de la démarcation de Tordesillas : possiblement, le cosmographe Duarte Pacheco Pereira, partant du Cap-Vert et arrivant peut-être dès novembre 1498.

BIBLIOGRAPHIE

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