LIVRE DE LA SEMAINE — « Le communisme dans l’Histoire »


Notre livre de la semaine, Le communisme dans l’Histoire et les systèmes socialistes d’à présent, écrit en 1895 par Auguste Onclair, s’intéresse aux origines du communisme et à ses premières applications politiques, durant le siècle des révolutions, à la suite du Manifeste marxiste.


Le communisme dans l’Histoire et les systèmes socialistes d’à présent est publié pour la première fois en 1895. Il développe une analyse pertinente du communisme, en l’étudiant sous deux angles : l’historique et le doctrinal. Mais avant toutes considérations intellectuelles, il demeure fondamental de connaître dans les grandes lignes les dispositions intellectuelles de l’auteur.

À ce sujet, le préfacier écrit :

« De nationalité belge, Auguste Onclair (1822-1900) se consacra avec opiniâtreté à la dénonciation des pièges tendus par la franc-maçonnerie et, dans le même temps, à la promotion de la doctrine sociale de l’Église, alternative catholique au socialisme, lequel exerçait une puissante attraction sur les masses ouvrières du XIXe siècle. »

Il précise que son travail « lui valut les encouragements de Pie IX et Léon XIII et prit la forme de la publication d’une dizaine d’ouvrages. » Nous pouvons donc dire que l’abbé Onclair est un intellectuel militant.

Le communisme séduit souvent les masses et les intellectuels. Pourtant, l’abbé écrit :

« Voici un fait historique social : le communisme, après l’essai assez restreint qu’on a fait consciencieusement de ses théories en Grèce, a toujours été repoussé par les sociétés civilisées, et s’il a réussi à mettre le pied parmi elles, il a été violemment chassé. »

Avec le recul qu’offrent l’écroulement de l’Union soviétique et l’évolution de la Chine, l’on peut ajouter un autre fait historique social indiscutable. Ainsi, quand le communisme n’est pas rejeté massivement par les peuples, il finit par imploser sous ses propres et nombreuses contradictions.

Selon l’auteur et contrairement à une fable très répandue, le communisme ne naît pas au XVIIIe ou au XIXe, ni même au XXe siècle. Son origine remonterait à l’Antiquité : « Le premier peuple qui se présente à nous vivant sous un régime communiste, c’est celui de l’île de Crète, 1 300 ans avant Jésus-Christ. »

La Crète n’est pas la seule à appliquer le communisme. En effet, l’auteur évoque également le grand législateur spartiate, Lycurgue :

« Lycurgue partagea les terres en trente-neuf mille portions égales. […] Chaque famille qui en avait la possession devait fournir une certaine quantité de denrées annuelles à l’État pour l’entretien commun, et celle qui ne la fournissait pas perdait le droit de cité ».

Onclair étudie, au cours de son oeuvre magistrale, les différents avatars du communisme, pour montrer les failles de cette « doctrine de la mort ». Il développe, avec pédagogie, une idée intéressante :

« Il est absurde de faire tous les hommes identiques à l’Humanité et de leur refuser toute personnalité propre, alors que les principes et les faits nous prouvent qu’ils sont totalement différents. »

Il insiste pareillement sur un point important :

« Les professeurs de communisme donnent […] à leurs théories pour principe fondamental, la souveraine indépendance de l’homme par rapport à toute autorité spirituelle extrinsèque. Donc, quand les communistes font appel à la justice, au droit et au devoir, leur appel n’a pas de sens, attendu que ce sont là des idées détruites par eux précédemment : leur appel est en […] contradiction avec leurs doctrines. »

C’est une pensée logique, et finalement imparable. Toutefois, cet illogisme est la source de dizaines de millions de morts.

Durant l’Antiquité, Platon, le célèbre philosophe, commet son fameux ouvrage La République (Pérì politeïas), qui, d’après l’abbé Onclair et d’autres intellectuels de premier plan, magnifie la vie communautaire et les principes communistes. Cette doctrine est combattue avec force par Aristote.

La difficulté pour saisir cette idéologie afin de la combattre réside dans le fait suivant : « Le visage que prend aujourd’hui le communisme est nouveau. », mais il reste intrinsèquement dangereux car : « l’idée qu’il nous présente est loin d’être nouvelle, soit en théorie, soit dans la pratique ». L’auteur prend la peine de préciser ce qui suit :

« Sa forme pratique dans l’Antiquité ne lui a servi à rien. Il en a été de même de sa forme religieuse, de sa forme romanesque de l’utopie, de sa forme politique. Il y a des années qu’il combat sous la forme rationaliste pour vaincre enfin la répulsion qu’il inspire : jusqu’à cette heure le succès n’a pas répondu à son attente. »

Vingt-deux ans plus tard, la Révolution d’octobre détruit l’archaïque société russe et de telles erreurs doctrinales sont répandues sur l’ensemble du globe, avec son cortège de meurtres et de massacres de masse. À ce jour, le communisme est l’idéologie la plus meurtrière que l’Humanité connaît. Les historiens parlent de cent millions de morts1.

L’esprit communiste frappe de son empreinte l’histoire avant que la Russie ne se transforme en Union des républiques socialistes soviétiques (URSS). Ainsi, l’auteur écrit :

« Quand la société païenne se fut peu à peu transformée en société chrétienne, le communisme jeta le masque de la philosophie antique et de l’imposture religieuse et prit celui de l’Évangile. C’est dans cette attitude qu’il se présenta devant le monde avec une théorie basée sur l’hypocrisie. »

Ainsi naissent plusieurs sectes — Vaudois, Albigeois, Dulciniens, Pélagiens, etc. — revendiquant un christianisme authentique ou des origines, en réalité très éloigné des principes évangéliques. L’Église catholique combat ses mouvements promouvant à la fois une hérésie théologique et sociale. En effet, ces différents groupes voulaient imposer un égalitarisme forcené, en abandonnant toute idée de verticalité théologique et philosophique.

John Wyclif, Jean Bale (dit Baleus) et Jan Hus reprennent ses pensées hétérodoxes. Ils sont combattus. Afin d’être le plus exhaustif possible, précisons que Jan Hus apparaît comme un précurseur de Martin Luther. Ce dernier reprend nombre de ses thèses. Cependant, comme l’écrit l’historien tchèque Amedeo Molnár : « on peut estimer d’une certaine manière que Jan Hus n’était pas un préréformateur, mais que Luther était un posthussite ». Nous constatons qu’en Histoire, rien n’est jamais le fruit du hasard.

De même, Thomas More, dans son ouvrage Utopia, évoque le communisme par l’entremise de son personnage Hythlodée (formé de deux racines grecques, uthlos, bavardages, et daïos : expert ; concrètement expert en bavardages) :

« Dans tous les États où existe le droit individuel de propriété, où tout s’apprécie au poids de l’or, on ne saurait jamais faire régner la justice, ni assurer la prospérité publique. Pour rétablir un juste équilibre dans les affaires humaines, il est absolument nécessaire d’abolir le droit de propriété. »

D’autres ouvrages promeuvent le communisme : La Cité du Soleil de Thomas Campanella, La Nouvelle Atlantide de François Bacon, La communauté d’Océana de James Harrington, etc. L’abbé décortique les croyances de ces nombreux intellectuels qui défendent l’abolition du droit de propriété tels Georg Hegel, Jean-Jacques Rousseau, Denis Diderot, Gracchus Babeuf et Karl Marx, car selon eux : « Il faut partager les biens de façon à ce que chacun en ait sa part. » Pour rappel, Babeuf est l’auteur du Manifeste des égaux. Le titre est un programme politique communiste à lui tout seul.

L’auteur étudie et détaille les trois haines de Pierre-Joseph Proudhon, présentées comme suit : haine contre Dieu, haine contre l’autorité, haine contre le droit de propriété. Il prend également le soin de critiquer les théories marxistes, qui sont selon lui utopistes et dangereuses pour l’homme, parce qu’elles reposent sur des mensonges vieux comme le monde. La promesse de l’avènement d’un monde meilleur sans pauvreté et sans souffrance provoque encore des étourdissements chez nombre d’individus répartis sur tous les continents, nonobstant les échecs successifs des différents régimes communistes de par le monde.

C’est un livre instructif consacré au communisme historique et doctrinal que nous propose les Éditions des Cimes. L’analyse se montre fondamentale, car reposant sur des éléments objectifs. Le récit passionnera, sans nul doute possible, les chercheurs de vérité. L’aspect parfois répétitif de certains éléments doctrinaux ne devra pas rebuter le lecteur, tant l’ouvrage constitue une réelle source d’informations sur cette idéologie.

Les différents masques usés par cette dernière, tout au long de l’Histoire, sont décryptés sur le fond et la forme, dans le but de prévenir de ses nombreux dangers, dont le principal est la déshumanisation. L’étude de l’abbé Onclair est complétée des réflexions de Jean-Claude Lozac’hmeur, universitaire, et du philosophe Charles Chapyguine.

— Franck ABED

  • ONCLAIR (Auguste). Le communisme dans l’Histoire et les systèmes socialistes d’à présent. Paris, Éditions des Cimes, 250 p., 1895 (rééd. 2018)

1 — Le livre noir du communisme. Crimes, terreur, répression, est un ouvrage rédigé par un collectif d’universitaires, écrit en 1997 par Robert Laffont. Publié pour marquer le quatre-vingtième anniversaire de la Révolution russe de 1917, il dresse le bilan des victimes des régimes communistes.

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